INTERVIEW – Philippe Clergeau est professeur d’écologie au Muséum national d’Histoire naturelle, et consultant en écologie urbaine. Il est le coordinateur de l’ouvrage Urbanisme et biodiversité, vers un paysage vivant structurant le projet urbain (éditions Apogée). Il plaide pour des « continuités écologiques » et une « métropole-nature », basée sur la diversité des espèces animales et végétales. Des urgences mises en évidence par la crise sanitaire.
Un départ massif vers les campagnes lors des confinements, les berges et les parcs parisiens pris d’assaut, la demande de vert semble criante en ces temps de pandémie…
PHILIPPE CLERGEAU : Cette crise fournit une preuve éclatante que la nature est un besoin viscéral pour tout humain, et les urbains ne font pas exception. Combien elle est nécessaire au bien-être psychologique et physique de chacun, combien nous avons dans notre ADN cette tendance à tisser des liens avec elle, « cette biophilie » comme la nomme le biologiste Edward Wilson. Mais la pandémie a aussi souligné combien la métropole, en particulier son cœur, est incapable de répondre à ce besoin, faute d’espaces verts suffisants compte-tenu de sa densité. Qui plus est quand, comme lors du premier confinement, l’on décrète la fermeture des parcs et jardins… Cinq mètres carrés d’espaces verts par habitant pour les Parisiens [sans compter les bois de Boulogne et Vincennes, ndlr], c’est un chiffre assez ridicule : l’OMS considère qu’il en faut a minima 12 m2, tous les 300 mètres. Pas étonnant donc d’avoir vu 20 % de sa population fuir lors du premier confinement ! Sans compter un autre problème à l’échelle métropolitaine : des coins de biodiversité, des parcs, des forêts, des bois horriblement mal répartis et souvent mal desservis par les transports collectifs. De quoi renforcer le sentiment d’une profonde inégalité dans l’accès à la nature.
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